Milan Kundera est un écrivain tchèque né en Bohême en 1929. Il commence à se faire connaître dans les années soixante en publiant des poèmes et en éditant une anthologie de la poésie d’Apollinaire. Dans cette période là, il écrit aussi trois pièces : Les Propriétaires des clés, La Sotie et Jacques et son maître. La structure, le contenu, ainsi que les titres de ces pièces – rappelant le théâtre d’Ionesco et le roman Jacques le Fataliste de Diderot – préfigurent déjà le ludisme de l’œuvre Kundera. C’est cependant dans ses premiers textes en prose qu’il découvre ce qui constituera son « orientation esthétique » :
« Pour la première fois, je m’étais trouvé moi-même, […] j’avais trouvé mon ton, la distance ironique à l’égard du monde et de ma propre vie, bref, mon chemin de romancier ; en effet, ce n’est qu’à partir de ce moment que commence mon évolution littéraire continue qui m’a apporté, il est vrai, bien des surprises mais plus jamais aucun changement dans mon orientation esthétique. »
Les premières manifestations de cette « évolution littéraire » sont, dans les années soixante, le roman La Plaisanterie puis le recueil de nouvelles Risibles Amours. C’est à ce moment là qu’intervient le contexte historique qui dorénavant constituera la toile de fond, le décor où évoluera le personnage kundérien. Cette circonstance ne fait pas de Kundera un romancier historique (catégorie d’écrivains à laquelle il refuse d’être associé) qui décrit une époque mais qui décrit plutôt « les soi-disant éternels problèmes humains éclairés par le projecteur d’une situation historique » . Kundera ne s’intéresse donc pas à l’Histoire – ni à toute histoire puisqu’aucun de ses romans n’est construit sur une unité d’action – mais aux personnages qui vivent cette Histoire. Ce contexte historique est le suivant :
Avril 1968, la nouvelle direction du Parti ouvre la voie aux importantes réformes de ce que l’on appellera le Printemps de Prague. Parmi ces réformes on trouve l’abolition de la censure, la réhabilitation des victimes des procès fabriqués et la protection du droit du citoyen. Face à cet essai de libéralisation du socialisme, l’Union Soviétique réagit par la force. Ainsi, le 21 août 1968, les chars soviétiques entrent à Prague et mettent fin à l’expérience tchécoslovaque. Kundera est alors frappé par la censure et son œuvre est déclarée non existante. Ses romans ne peuvent plus paraître dans son pays et, à partir de La vie est ailleurs, leur première édition est leur traduction française . En 1975, il s’installe en France, ce qui lui permet de revoir et corriger la traduction de ses romans, notamment celle de La Plaisanterie où un style excessivement ornementé avait complètement transfiguré le roman. Ce déménagement contribue à son passage à la langue française. Ses essais sur le roman – L’Art du roman et Les Testaments trahis – et ses derniers romans – La Lenteur, L’Identité et L’Ignorance – sont ainsi directement rédigés en français.