Conclusion

Les trois thèmes étudiés révèlent, du moins en partie, la contribution de Kundera à la composition romanesque.

Ainsi, l’œuvre de Kundera apporte un éclairage nouveau à l’identité problématique de l’être, un thème qu’il considère comme indissociable du genre romanesque. Le personnage ne se définit pas ici par un nom, un passé ou un visage mais par des procédés plus esthétiques. Parmi ces procédés, on distingue par exemple la position fœtale, sorte de matrice originelle à laquelle le personnage retourne de temps en temps ou bien le code existentiel, segment d’ADN constitué de quelques mots qui caractérisent l’être kundérien. D’autres personnages se définissent aussi par rapport à un arrière-plan historique ou fictif qui constitue un décor, une toile de fond devant laquelle se déroule leur vie.

Le kitsch, quant à lui, démystifie à travers quelques thèmes (l’Histoire, le lyrisme et l’érotisme) la composition romanesque devenue elle-même kitsch. Cependant, le ton n’est pas purement subversif comme il aurait pu l’être mais, en plus de la déconstruction de la beauté kitsch du monde, Kundera recherche et expérimente un autre univers esthétique qui, pour reprendre les termes de Gombrowicz, « correspondrait davantage à notre sort et à notre histoire récente ».

« L’art du roman est venu au monde comme l’écho du rire de Dieu. » (ART) Le rire, enfin, est l’hommage de Kundera au « roman moderne », une contribution personnelle à ce roman qui a inventé l’humour et dont le rire, selon Kundera, se perd peu à peu dans l’univers infini de la graphomanie.
Ces thèmes, au-delà de l’intérêt purement thématique, traduisent ainsi la relation que Kundera entretient avec l’art de la composition romanesque. C’est cependant la variation qui investit ces idées de leur portée supra-thématique. Grâce à la variation, chaque thème n’est pas un cas isolé de l’œuvre qui n’apparaît que dans une page perdue d’un roman mais exprime une idée inhérente à toute l’œuvre. Chaque thème est ainsi une représentation de l’esprit des romans de Kundera et, de ce fait, dépasse son statut de simple idée et devient une représentation de l’œuvre en tant que création romanesque et esthétique.